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L’inflation : quelle menace pour notre industrie, et les valorisations d’actifs ?

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27/04/2022

L’inflation : quelle menace pour notre industrie, et les valorisations d’actifs ?

1. L’inflation est-elle temporaire ?    

Depuis la sortie du Covid, force est de constater que l’inflation est repartie à la hausse, amplifiée par la guerre en Ukraine. Le prix du baril (Bent) a atteint de sommets depuis 2014, à 108$.   L’inflation est tirée par la hausse des prix de l’énergie comme le montre le graphe ci-dessous, et encore, c’était avant la guerre !

Début Mars, la BCE prévoit une inflation de 5,1% en moyenne en 2022, avec un retour progressif à la normale, 2,5% en 2023 et 1,9% en 2024. A noter que l’Espagne bat tous les records avec plus de 9% d’inflation depuis le début de l’année, pendant que l’Allemagne atteint 7,6% d’inflation, du jamais vu depuis les années 1970. La France reste relativement plus épargnée avec xx.

La guerre dure, et malgré la politique zéro covid de la Chine, qui est désinflationniste, les chiffres aux Etats-Unis sont également très tendus, et l’inflation risque de perdurer au-delà des anticipations de la BCE.  Alors même que les prévisions de croissance de l’économie sont à la baisse…nous conduisant à la redoutable « stagflation ».

 

2. Quel impact sur les taux d’intérêt et les marchés obligataires pour les foncières ?    

Le taux de swap 5 ans, mesure benchmark pour le refinancement des entreprises à long-terme, a augmenté d’environ 80 bps depuis la fin de l’année dernière.  On reste néanmoins à des taux de swap très raisonnables de 1%.  Auquel s’ajoute la prime de crédit, afin d’attirer les investisseurs.

Source : Crédit Agricole Corporate & Investment Bank

Les coupons payés par les entreprises sur les marchés de capitaux depuis la guerre ont nettement augmenté.  Ainsi Vonovia, une des foncières allemandes les mieux notées du marché (A3/BBB+) a émis le 21 mars, une obligation à 8 ans, présentant un coupon de 1,875%, vs. 1%il y a 2 ans…

Si l’inflation persiste, la BCE finira par augmenter ses taux directeurs ce qui entraînera une augmentation du taux de swap.  Par ailleurs, la BCE a réduit son programme de « quantitative easing » comme annoncé l’an dernier. Le volume d’achats de la BCE sur le marché obligataire primaire est passé de 40% à 20% des volumes émis. Les entreprises risquent de devoir payer plus cher pour attirer les investisseurs, la BCE se retirant progressivement du marché obligataire.

Et ce, au moment où les foncières se sont détournées des marchés bancaires pour au profit des marchés obligataires ces dernières années.  Ainsi, entre 2020 et 2021, le volume d’émissions obligataires sur le secteur des REITs a augmenté de 70% ! Les foncières représentent près de 20% des émissions obligataires en Europe, le double vs. 2010…une tendance structurelle.  

Dans cet environnement assez « chargé », les foncières n’ont pas le choix que d’émettre en format Green.  Ainsi, les émissions ESG représentent 57% des émissions sur le real estate, alors que ce pourcentage est de 34% sur l’ensemble des émissions obligataires d’entreprises en Europe.  Source : Crédit Agricole Corporate & Investment Bank  

3. Et quel impact sur les Cash Flows immobiliers?     

La théorie nous dit 2 choses : l’inflation est positive pour les loyers, car indexés sur des indices liés à l’inflation. Mais l’inflation provoque la hausse des taux et l’augmentation des coûts de refinancement.  Quel est l’impact, au final, sur le compte de résultat ?

La société en recherche et courtage en actions Kepler Cheuvreux a modélisé un « cas de base » où les loyers augmentaient de 3% par an (reflétant partiellement l’inflation actuelle), et les taux de 75 points de base de manière pérenne (proche de ce que l’on voit actuellement).  Ainsi, comme on le voit ci-dessous, peu d’impact sur le résultat : l’effet inflationniste sur les loyers compense la hausse des taux pendant les premières années. Ensuite, il devient positif pour les cash flows.


4. Impact sur les valorisations 

  • La Théorie : La valorisation d’un actif immobilier par la méthode du rendement ou de l’actualisation des cash flows prend en compte, pour simplifier, l’évolution des loyers / cash flows nets au numérateur et du taux de capitalisation / rendement au dénominateur.   Si le numérateur n’est pas impacté par l’inflation comme le montre le 3. ci-dessus, le taux de capitalisation (Yield) a un effet particulièrement important sur les Valos. Une augmentation des taux de cap de 50 points de base, pour un actif prime (avec un yield initial de 4% avant la hausse), fait baisser la valo de l’actif de 11% !

Mais l’inflation et la hausse des taux auront-ils un tel impact sur les taux de capi ? Rien n’est moins sur.  Et ce pour plusieurs raisons :

  • Sentiment des Investisseurs : Avec la crise actuelle, l’immobilier pourrait être considéré comme une valeur refuge par les investisseurs. Ainsi la société de recherche et de courtage en actions Kepler Cheuvreux observe un regain d’intérêt des investisseurs pour les actifs réels plutôt que les valeurs financières. Certains pays pourraient sortir renforcés (UK, Suisse, Norvège) et d’autres plus impactés (Allemagne, Nordics). 

  • Prime de risque : au delà du sentiment des investisseurs, on note que le gap entre le taux de rendement immobilier et les taux souverains (gap de 300 bps en moyenne depuis 20 ans ) était bien supérieur à cette moyenne historique  ces 10 dernières années (à part pour la Norvège).  L’inflation qui reprend depuis fin 2021, amplifié par la guerre en Ukraine, resserre cet écart.  Mais 300 bps, cela reste encore considérable.  Cette « prime » confortable reste encore appréciée des investisseurs.

 

Si l’on regarde par sous-secteurs, lesquels sont le plus « at risk »   ?

  • Les promoteurs ou les actifs amenés à être redéveloppés : clairement plus sensibles à une hausse des coûts de matières premières et une augmentation des taux d’intérêt et des taux de rendement. Ainsi l’inflation aurait un impact direct sur le prix de revient.  Les marges promoteurs (alors même que les valorisations pourraient baisser légèrement) souffriraient d’un effet ciseau : augmentation des prix de revient et valeur de revente en baisse.
  • les actifs fortement corrélés à la confiance des ménages dans l’économie pourraient connaitre une nouvelle augmentation de leurs taux de rendement :
    1. les consommateurs inquiets par les perspectives d’inflation pourraient vouloir réduire leurs consommations non-essentielles et leurs voyages. Ainsi le retail non essentiel, après s’être stabilisé, pourrait de nouveau être impacté.
    2. Idem pour l’hôtellerie moyenne/haute gamme.
    3. La perspective de « stagflation » pourrait être une raison de retarder une décision de déménager, et la demande de surface de bureaux pourrait baisser.    
  • En revanche, il semblerait que le résidentiel, les actifs de santé et la logistique soient relativement insensibles à ces évolutions, la demande étant structurellement orientée à la hausse.

En conclusion, malgré une certaine résilience du secteur, et un appétit renouvelé des investisseurs, il n’est pas exclu que les valorisations soient orientées à la baisse. En l’absence d’ une sortie rapide de la guerre d’Ukraine, et une politique d’autonomie énergétique renforcée, l’inflation et les taux d’intérêt ne vont pas immédiatement baisser.  Les gérants devront prêter une attention toute particulière à la gestion de leur passif.

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